Une infirmière maléfique...
Le vendredi 13 novembre 1943, au milieu de la nuit, un orage d'une violence inouie s'abattit sur les marais boueux qui s'étendent sur des miles, entre Lake City et Folkestone, à la frontière de la Floride et de la Georgie. Le pays qui entoure ces marécages est l'un des plus inhospitaliers du monde : à quelques heures seulement de Miami, au coeur de l'un des plus riches états d'Amérique du Nord, les marais d'Okefenokee ont une sinistre réputation : on ne compte plus les touristes qui y ont disparu, les évènements étranges ou effrayants qui s'y déroulent, comme si le mal avait choisi cette région hostile et défavorisée pour y exercer ses pratiques. C'est ainsi que l'orage terrible qui frappa les environs, le vendredi 13 1943 est encore dans tous les espruts. Cette nuit-là, dans l'hôpital vétuste et encombré d'une petite ville, trois femmes, allongées dans des lits de fer, attendent en priant le moment d'accoucher. Selon les coutumes locales, il n'est pas bon d'accoucher un vendredi 13, et encore moins par temps d'orage. Il existe ainsi de vieilles légendes qui se perpétuent sans qu'on puisse connaître leur origine.
La première de ces femmes est une jeune servante. Elle est blonde, douce, comme résignée. Elle vient d'épouser un garçon de ferme courageux et travailleur. La seconde est un peu plus âgée. Elle est fermière et son corps fatigué porte les traces de plusieurs accouchements. La troisième est une jeune noire d'une troublante beauté. Ses longs cheveux sombres s'enroulent autour de son corps, et ses grands yeux en amande fixent la nuit avec crainte. Près de ces trois femmes, une infirmière s'approche. Dehors, l'orage redouble de violence. Des éclairs blêmes illuminent les étendues désolées qui entourent la ville. Des tourbillons de vent furieux secouent les arbres et couchent sur le sol les maigres bosquets qui entourent les marécages. L'infirmière s'approche des trois lits où, côte à côte, les parturientes attendent la délivrance. L'infirmière se penche vers elles. Elle a le teint gris, des yeux qui laissent filtrer une lueur métallique entre les paupières minces. Ses mains tremblent. Sa voix s'élève alors, plongeant les trois pauvres femmes dans la frayeur :
- C'est l'orage de la mort, siffle-t-elle. La mort du vendredi 13...La mort sur les enfants qui naîtront cette nuit...!!
Puis une étrange mélopée s'échappe de ses lèvres, et la jeune noire, instinctivement, trace le signe de croix sur son front : elle vient de reconnaître une prière "vaudou", le cultee des sorciers et de la mort...L'infirmière devient hystérique. Son corps se balance comme s'il était pris dans un remous, ses yeux deviennent blancs. Elle désigne la première femme qui écrase ses poings sur ses oreilles pour ne pas entendre la sorcière.
- Tu auras une fille et elle mourra avant son 16° anniversaire...Elle se tourne vers la fermière aux cheveux roux : "Tu aura aussi une fille et ce sera ton dernier enfant. Mais elle n'atteindra jamais ses 21 ans..! Enfin avec un rire dément elle se penche vers la noire qui prie en tremblant : "Quant à toi, ta fille mourra la veille de ses 23 ans ! La veille, et tu ne pourras rien faire"...Elle éclata d'un rire affreux jouissant de la terreur. Elle s'éloigna et se perdit dans les ombres qui entouraient l'hôpital. Il convient de rappeler, à ce moment du récit, que cette histoire est absolument authentique, et que de très nombreux articles de presse autant en France qu'aux Etats-Unis peuvent l'attester. La jeune femme blonde accoucha d'une petite fille qu'elle appela Lisa. La fermière accoucha peu après d'une autre petite fille rousse qu'elle prénomma Maureen. La jeune noire mit au monde une fille qui fut appelée Jane. Les années passèrent. Dans la régions des marécages d'Okefenokee, trois fillettes grandissaient au milieu des autres. L'une devenait blonde, frisée et sportive, c'était Lisa. Maureen avait les cheveux de feu et un sourire espiègle. Et Jane, avec sa peau noire, la plus jolie peut-être des trois - grandissait encore plus vite que les autres, en devenant mince, rêveuse et gaie. Lorsque, par hasard, les trois mères se rencontraient dans les boutiques de Lake City ou de Folkestone, elles échangeaint des regards qui trahissaient leur angoisse, mais jamais elles n'osèrent évoquer la terrible nuit de leur accouchement, dans la crainte de réveiller le mauvais sort. Elles portaient avec elles leur effrayant secret, en priant chaque jour que les malédictions ne se réalisent jamais.
En 1959, Lisa entra dans sa 16° année et sa mère redoubla d'attention et de soins pour elle. A force de travail et de privations, les parents de Lisa avaient acheté une petite ferme où l'on vivait heureux. A l'approche de son 16° anniversaire, inexplicablement, sa mère interdit à Lisa de sortir. Lisa insista. Sa mère demeura inflexible. Très contrariée, Lisa qui comptait fêter son anniversaire avec ses copains, se plaignit à Bob, son meilleur ami : "Les parents sont tous pareils répondit Bob. Si tu a envie de sortir je viendrais te chercher à minuit et on fêtera ton anniversaire ensemble". A l'heure prévue, Bob emmena Lisa, à l'insu de ses parents, dans une voiture qu'il avait empruntée à un ami. A vrai dire, il ne possédait pas de permis et lorsque la voiture dérapa sur des gravillons, il ne sut rien faire pour éviter l'accident : les policiers retirèrent deux cadavres du ruisseau où l'automobile était tombée. Lisa avait été tuée sur le coup le jour de ses 16 ans. Lorsqu'elle apprit l'accident de Lisa, la mère de Maureen crut devenir folle. Elle ne put garder son secret et raconta l'histoire à sa fille Maureen qui fut profondément choquée par cette révélation. Pendant les 5 années qui suivirent, Maureen vécut dans une terrible angoisse. Elle perdit le sourire, se réfugia dans la religion et se mit inconsciemment sous la protection de ses parents qu'elle ne quittait plus. Dans la nuit du 13 novembre 1964, les parents armés de fusil, veillèrent devant la porte de leur fille, prêts à chasser le Diable en personne s'il venait à se montrer. Le soleil se leva sur la journée du 13 novembre, sans que rien ne se soit passé. Pour fêter ce bonheur, le père décida d'emmener sa femme et Maureen au restaurant, à la ville la plus proche. Ce fut un véritable banquet. mais au moment où Maureen sortait du restaurant, en tenant le bras de son père, deux hommes sortirent du bar d'en face. Ils avaient trop bu. Ils commencèrent à s'injurier puis à se battre. Soudain, l'un des deux sortit un revolver et tira à plusieurs reprises sur son adversaire. Maureen poussa un petit cri de douleur et s'effondra dans les bras de son père : une balle perdue l'avait frappée en plein front.
La mère de Jane sombra dans une sorte de torpeur. Elle ne voulait pas admettre la vérité. Comme la mère de Maureen, elle se crut obligée de raconter son histoire de malédiction. Comme Maureen, Jane fut profondément choquée. La mère de Jane prit conseil auprès d'un médecin, d'un prêtre mais personne ne l'a prit au sèrieux. Les parents décidèrent de quitter la région maudite et s'installèrent à Baltimore, où le père de Jane prit un emploi de pompiste dans un garage de la ville. Sa mère travailla dans un supermarché. Ils fêt-rent le jour de l'an 1966. Jane embrassa ses parents et leur demanda d'une petite voix :
- C'est cette année que cela doit se produire, n'est-ce pas..? Les parents, baissèrent la tête...! La jeune fille interprètait les plus banales rencontres comme des signes de son destin. Elle perdit le goût de vivre. Sa mère obtint que sa fille soit hospitalisée à Baltimore où un jeune médecin, ému par la beauté de Jane, sut la mettre en confiance et obtint d'elle qu'elle lui raconte son épouvantable histoire. Le jeune médecin secrètement amoureux de la jeune fille, lui expliqua que les malédictions ne pouvaient exister. "Vous êtes en bonne santée et rien ne vous menace" lui dit-il. "Je sais que je vais mourir, je dois mourir, ca n'est pas la peine de lutter, répètait la jeune fille d'une voix éteinte. Le médecin entreprit une enquête auprès de la mère de Lisa, puis auprès de celle de Maureen. Il se rendit à l'hôpital où étaient nées les trois jeunes filles. Mais personne ne se souvenait de l'infirmière "vaudou". Jane mourut dans son lit d'hôpital le 11 novembre 1966. Deux jours avant son 23° anniversaire. On n'a jamais su expliquer sa mort.
On se souvient seulement qu'au moment de sa mort, un violent otage éclata sur la ville...